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Couple tantrique, Tantra en couple

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Couple tantrique ?

Dans mes accompagnements, je reçois souvent des couples, mais encore plus souvent l’un des conjoints seul, qui désire s’engager et engager son partenaire dans la démarche tantrique. Le Tantra peut-il « sauver le couple » ?

Difficile de définir ce qu’est un « couple tantrique » si l’on n’a pas déjà défini ce qu’est un « couple » tout court aujourd’hui. Mariés, pacsés, concubins, amants, célibataires, amants « adultérins », vivant ensemble ou séparément, avec enfants ou non, couples occasionnels... ? La panoplie est large ! Or la situation des partenaires tantriques dépend assez largement de leur situation sociale et est en lien étroit avec leur vision du Tantra. Pour entrer dans le concret, un couple marié depuis longtemps, pratiquant le tantrisme au sein du couple et uniquement au sein du couple, est dans une situation très différente de celles de deux amants que le tantrisme a réunis et que seul le tantrisme réunit. La situation influe énormément sur la vision et la pratique qu’elle va abriter, et vice-versa, la vision et la place que chacun donne au tantra influera sur le type de couple qu’il va former. Toutes sortes de cas existent, y compris le cas de ceux ou celles qui pratiquent le tantrisme en dehors de leur couple social. On a donc affaire à une multiplicité de cas de figures dans laquelle il est finalement impossible de dégager un profil type du « couple tantrique ».

En tout état de cause, on oublie trop souvent que le couple n’est pas le but du Tantra, et l’on oublie trop souvent que le “couple” Shiva/Shakti n’est pas “deux”, mais Un à deux faces. Dans la symbolique, l’union de Shiva et Shakti, comme celle du Yin et du Yang, représente l’union - ou plutôt la ré-union - de l'être "entier" qui existe au fond de chacun (androgyne). En définitive, le Tantra est avant tout une affaire personnelle dans laquelle "charité bien ordonnée commence par soi-même". Ce principe est la seule chose qui soit “sacrée”. Il est aussi la seule chose qui est “conscience” et qui, n’étant pas sujette aux conditionnements, est bonheur et liberté. C'est cette conscience heureuse et libérée qu'on apporte dans son couple comme le cadeau nuptial de chaque jour.

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L’étouffement du couple : le contrat social

Tout ce que je vais dire du couple ici n’est nullement péjoratif, il n’y a aucun dénigrement ; je suis moi-même en couple avec enfants, vivant « comme tout le monde » les fonctionnements décrits. L’humain a besoin de sentiments, de sécurité conjugale, familiale, de fidélité, loyauté, d’amour constant. Le besoin de développement personnel (ou spirituel) conduit simplement à se transporter sur un autre plan, se poser en observateur des phénomènes psychologiques qui ont leur place « normale », mais dont on pressent les limites et les pièges quand on veut élargir son horizon, s’élever ou simplement guérir des blessures. A un certain stade de sa vie, on peut avoir le sentiment de « tourner en rond » et d’être enfermé(e) dans des schémas répétitifs qui nous suivent de partenaire en partenaire, soit parce que nous les attirons, soit parce que nous les portons en nous (ce qui revient au même au fond).

Le couple repose sur un contrat : je t’aime/tu m’aimes, c’est posé, c’est pour toujours (ou au moins longtemps), et ça implique toute une série de droits et devoirs - en particulier affectifs - dans lesquels la dialectique de séduction/conquête du début perdure sous forme de conservation (comment le/la garder à tout prix), avec moins de charme mais tout autant de pression. Dans cette mise en place, tout un cortège de compromis, concessions, « sacrifices » se sont installés au détriment de notre liberté d’expansion (chacun se bloque et bloque l’autre inconsciemment). La plupart du temps, ces compromis, abdications etc… ne sont pas exprimés (et même pas conscients), surtout dans le domaine affectif et sexuel, lequel passe peu à peu du premier plan (les premiers émois effervescents) au second plan, voire dernier plan, car ce n’est pas dans notre culture de mettre le sexe - réputé non-noble - au centre. La routine menace de s’installer, avec elle l’étouffement progressif, et peu à peu l’usure. L’amour du départ deviendra une coquille à peu près vide (le contrat), l’énergie échangée dans l’amour physique étant détournée dans les occupations plus « sérieuses » (la famille, l’activité professionnelle etc…). Notre espace intérieur se rabougrit, se sclérose, s’atrophie (à l’image de notre espace extérieur, nos journées remplies, nos espaces confinés). L’être étouffe, s’asphyxie… et le couple aussi, naturellement, car deux individus étouffés ne peuvent faire un couple épanoui. On finit par ressentir un besoin impérieux de se ré-oxygéner, les appels au-secours restent sourds, chacun étant crispé dans sa position ; on finit par chercher l’air ailleurs, (relation extra-conjugale, séparation…) et on reproduit le schéma, indéfiniment. L’amour d’aujourd’hui ressemble de plus en plus à une consommation, le produit vieillit vite, on en change plus souvent. Tout est imputé à « l’autre », on oublie qu’il ne s’agit que de soi.

L’individu ne peut pas vivre sans amour, certes, mais encore faut-il que cet amour soit vécu, et pas seulement théorique ! Les paroles, les contrats de départ, ne nourrissent pas. Ce qui nourrit passe par le corps. Voilà la place du sexe, nourrir le corps, libérer l’énergie. Le corps animé vit d’énergie échangée, diffusée, dilatée, sublimée. Libérer la créativité, l’émerveillement, le sens du jeu (« lîlâ »). Tout ce qui reste mental, cérébral, n’est d’aucune utilité pour l’être vivant, c’est juste desséchant. La sexualité est le baromètre de la relation de couple, tout ce qui s’y passe se passe dans le couple, c’est le miroir et le résumé de la relation, particulièrement pour les non-dits. Comment dire à l’autre - qui, en principe, cherche à nous faire plaisir- que ceci-cela ne nous fait plus plaisir ? Que d’autres choses, d’autres angles nous feraient plaisir ? Comment dire à l’autre que ses petits tics, habitudes, qui faisaient son charme au commencement sont devenus agaçants à la longue ? Comment débloquer sa créativité, son renouvellement, sa fraîcheur ? En lui laissant de l’espace, en laissant de l’espace à son corps, son plaisir, sa créativité.

 

L’aération du couple : commencer par soi-même

Faire de l’espace en soi-même, aérer son temple intérieur est le meilleur gage d’aération pour le couple, d’échanges ouverts, fluides et fructueux. Deux épanouis font un couple épanoui. C’est tout l’inverse de la dépendance, de l’aliénation, dans laquelle chacun vampirise l’autre (même avec les meilleures intentions et au nom de l’amour). Pour s’ouvrir à l’autre, le recevoir, lui donner, encore faut-il avoir soi-même de l’espace pour recevoir, de l’espace à communiquer. La subjectivité (qui est tout le contraire de l’égoïsme) est la clef de la libération et de la relation. C’est sa propre créativité, sa propre fraîcheur qui va faire celle de l’autre, conçu comme un prolongement de soi. C’est dans le ressourcement incessant de soi que l’on abreuve aussi l’autre. C’est dans la spatialité que l’on grandit et qu’on fait place à la grandeur de l’autre. On ne vampirise plus, on accueille, on intègre, on irrigue, sans possessivité, par l’effet spontané de son propre bien-être.

Désencombrer l’intérieur, nettoyer sa propre « maison », n’est pas le travail de l’autre. Rien ne peut être fait de l’extérieur. Tant la motivation que le travail lui-même ne peuvent être le fait que de soi-même, sauf à être artificiels. L’autre peut être une aide, un auxiliaire, mais le plus souvent, la dialectique sentimentale le prédispose mal à ce rôle, car il est vite devenu le miroir de nos problèmes, il n’est pas neutre ni lucide. L’aide doit être neutre sentimentalement, et neutre historiquement (ne pas être celui avec qui on a construit nos remparts). Ce n’est que du bon sens.

 

L’accompagnement tantrique

L’accompagnement tantrique postule ces conditions : neutralité sentimentale et historique (nous n’avons pas d’attachement, pas de passé commun). Nous n’avons pas de projets, pas de projections à faire, nous savons tous les deux pourquoi nous sommes là, il y a un cadre défini, professionnel, la spécificité de l’échange physique (par rapport à d’autres voies ou thérapies) ne change rien à ces paradigmes. Il n’y a pas d’enjeu affectif entre nous, rien à perdre rien à gagner ; cela permet une grande liberté d’action et de parole. Nous travaillons avec le corps comme le fait un médecin, un prof de yoga, un ostéopathe. Nous travaillons avec l’énergie comme en yoga. Cette neutralité nous permet de travailler dans la transparence nécessaire au nettoyage. Nous ouvrons l’espace bien au-delà de ce qui est possible autrement, un espace d'amour inconditionnel et non possessif, nous visitons tous les recoins négligés, oubliés, méconnus, refoulés, ensevelis, dans une parfaite neutralité, sans concession et sans jugement, comme les régions vivantes et inexplorées de l’être, les ressources ignorées. Nous dissolvons les barrières en douceur…

à suivre…

Luc Olivier

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